1968: MEXICO: UN ETHIOPIEN PEUT EN CACHER UN AUTRE

Mexico était un choix décrié car cette ville est en altitude, ce qui permettra de battre de nombreux records pour les courtes distances, mais pour les sports d'endurance, c'est une autre histoire, en effet l'effet de l'altiotude avec la raréfaction de l'oxygène inquiétait beaucoup les athlètes et on prévoyait de nombreuses défaillances, surtout chez les athlètes ayant une grosse musculature qui demande donc beaucoup d'oxygène.

Le suspens concernant Abebe Bikila ne va durer que quelques kilomètres, très vite on s'aperçoit que Bikila a une sorte de claudication inhabituelle, ce n'est plus le même foulée, la foulée qui l'a vu victorieux à Rome et à Tokyo. Au 15ième kilomètre il n'est plus dans le groupe de tête, c'est la stupeur, il abandonnera un ou deux kilomètres plus loin, en raison d'une fracture du péroné qui a contrarié son entraînement et le fait souffrir horriblement. C'est dans une ambulance qu'il va terminer le dernier marathon de sa carrière. Il déclarera: " Si cela avait été mon premier marathon olympique, j'aurais fait l'effort de continuer. Mais j'ai déjà gagné deux fois et la douleur était si forte que je n'ai pu aller plus loin. D'autre part, Mamo Wolde était dans le groupe de tête et je sentais bien qu'il pouvait me succéder.

En effet en tête on trouve le belge Roelants qui passe au 20ième km en 1h06'02", soit huit minutes de plus que le record du monde du 20km qu'il détenait, mais n'oublions pas que nous sommes en altitude. Wolde, 1m72 pour 53kg, est parti prudemment comme tous ceux qui termineront décemment. le kenyan Naftali Temu va à son tour s'emparer de la tête de course, lui qui a déjà remporté le 10000 mètres, quant à Roelants ses jambes soudain plombées l'ont fait dériver à la huitième place. Ce ne sera pas le seul à connaître une défaillance, dans ces criconstances particulières, Derek Clayton a déjà eu la sienne, puis ce sera au tour de Temu qui laissera alors la première place à Wolde, alors âgé de 36 ans. (il finira  encore troisième, à 40 ans, du marathon olympique de Munich en 1972). Finalement Wolde va se détacher et s'envoler vers la victoire, finissant en 2h20'26", avec trois minutes d'avance sur le japonais Kimihara. Longtemps voué aux seconds rôles, il marquera de l'embarras au moment de briser le fil, puis effectuera deux tours d'honneur exubérants, follement applaudi par la grande foule chaleureuse qui, captivée par le dernier saut insolite de l'Américain Dick Fosbury à 2m24, ne lui a tout d'abord prêté aucune attention. (l'autre grand moment de ces jeux sera le saut en longueur avec Bob Beamon).

On attendait beaucoup de grosses défaillances, il y en eut, mais la plus spectaculaire fut celle du Tanzanien John Akhwari qui est arrivé dernier en 3h25'17". Jusqu'au trentième kilomètre, tout alla à peu près bien pour lui. Soudain il fut torturé par des crampes et agité par des spasmes. Deux km plus loin, il chutait lourdement à terre et se blessait assez gravement au genou droit. Son entraîneur lui fit alors deux impressionnants bandages en l'exhortant à abandonner. Akhwari mit plus de 60 min pour aller du 30ième au 40ième km, mais il continua cahin-caha.

Wolde, une fin de vie en prison

La fin de vie de Mamo Wolde va être bien triste, un peu à l'image de celle de Bikila terrassé par un accident de voiture et qui finit sa vie sur une chaise roulante. Wolde lui va la finir en prison. Maintenu en détention depuis neuf ans et condamné le 18/02/2002 à six ans de prison ferme pour "avoir participé à des exécutions sommaires", il a été libéré le lendemain, car cela faisait 9 ans en 2002 qu'il était emprisonné.

Le capitaine Wolde, accusé "d'être impliqué dans l'exécution" d'un jeune Ethiopien, Samuel Alemu, durant la période de la "Terreur rouge" en 1978, avait été condamné à six ans de prison ferme par la Haute Cour fédérale. La Haute Cour avait estimé que les preuves produites par le procureur spécial corroboraient les charges retenues contre l'ex-médaillé, mais avait requis l'application de la sentence à partir du jour de son arrestation, ce qui entraînait dès lors sa libération après quelques formalités administratives, .

Le capitaine Wolde, qui a rejoint sa famille, faisait partie d'un groupe de prévenus accusés "d'avoir planifié et exécuté" des actes de "génocide et crimes contre l'Humanité" dans un district d'Addis Abeba.

Les procès de la "Terreur rouge" (années 1977-1978), période durant laquelle des dizaines de milliers de jeunes Ethiopiens ont été tués ou ont disparu sous le régime du colonel Mengistu Haïlé Mariam (1974-91), ont débuté à Addis Abeba en décembre 1994.

Le colonel Mengistu, dit le "Négus rouge", vit en exil au Zimbabwe, et est jugé par contumace

Wolde va mourir quelques mois après sa libération, à l'âge de 71 ans.