Le jour de la course, il arrive au départ habillé en
chemise de nuit avec de longues manches, un pantalon et des chaussures de
ville munies de gros talons. Il acceptera de se faire couper le pantalon
à hauteur des genoux et partira avec un peu de retard, trottant avec
désinvolture, plaisantant avec les spectateurs, s'arrêtant pour voler
deux pêches ou pour monter dans un pommier et croquer des fruits verts
qui lui provoquèrent des troubles d'estomac en fin de course. Il finit
donc malgré tout quatrième et on ne le vit plus dans aucune course...
Une blague de mauvais goût
Mais le mieux reste à venir, la terrible chaleur provoque des
défaillances dont celles de Mellor et Newton qui étaient en tête, à ce
moment là Hicks se retrouve en tête. De son côté Lorz s'est arrêté
également victime de nombreuses crampes, là plusieurs versions existent,
mais il se serait arrêté épuisé sur le bas côté, faisant des signes
aux coureurs qui passaient. Reposé, il accepta de monter dans une
automobile qui remonte les concurrents un à un, les encourageant de la
voix et du geste. A 8km de l'arrivée, le véhicule s'arrête à cause
d'ennuis mécaniques, ragaillardi par la promenade, il se remet à
trottiner pour retrouver ses vêtements et rentrer chez lui, il se
présente sur la piste et la foule se met à l'acclamer comme le
vainqueur, Lorz savait que cette réception était ridicule mais il se
prit au jeu et trouva plaisant de prolonger un peu le gag. Quand Alice
Roosevelt, la fille du président, s'apprêta à le féliciter, décidant
que la plaisanterie avait assez durée, il révéla qu'il n'avait pas
couru toute la distance du marathon. (D'après une autre version, il
n'aurait rien dit et c'est Hicks qui en retrouvant connaissance aurait
dénoncé la supercherie). Lorz fut disqualifié à vie après cette
blague et la plaque de verre photographique en compagnie de Alice Roosevelt
fut brisée sur le champ. En fait suite à des témoignages favorables
apporté par des concurrents, la peine fut réduite à un an, et Lorz qui
n'était pas un tocard, remporta en 1905 le marathon de Boston
Un vainqueur en bien mauvais état
Hicks (dont le métier était clown) sera donc
fort justement déclaré vainqueur de la course après avoir été
accueilli fraîchement par le public, mais il était en fort mauvais état
depuis le 30ième kilomètre, il allait s'évanouir quand ses deux
suiveurs s'empressent de le secourir en le soutenant sous les aisselles
(photo), lui donnent un blanc d'oeuf à avaler et lui administrent une
petite dose de strychnine. Ne sentant plus la fatigue il repart aspergé
d'eau par son entraîneur. A trois kilomètres de l'arrivée il s'arrête
à nouveau, titubant au bout d'une dernière colline. Comme les
spectateurs l'encouragent et après une seconde injection de strychnine,
il arrivera enfin sur la ligne (3h28'53") à demi inconscient puis il
va s'évanouir. il ne faudra pas moins de quatre médecins pour le ranimer
dans le vestiaire où il a été transporté et où on l'a donné pour
mort après un premier diagnostic. Il retrouvera assez de force pour
prendre en somnambule le trolleybus jusqu'à son logement. Il recevra sa
médaille d'or quelques jours plus tard et dira alors "je préfère
avoir gagné cette course plutôt que d'être président des Etats-Unis".
On remarquera aussi que le dopage n'était pas la préoccupation des gens
de l'époque. Le deuxième sera Albert Corey, qui portait les couleurs de
Chicago ce qui l'a fait considéré comme citoyen américain alors qu'il
n'en avait pas encore la nationalité, étant français, le troisième
sera Arthur Newton, premier marathonien classé dans deux marathons
olympiques.
On finira en parlant de l'américain William
Garcia qui fut frappé d'hémorragie stomacale après avoir ingurgité
trop de poussière notamment, il fut ramassé à 12 km de l'arrivée et
fut sauvé de la mort à l'hôpital. Quand je vous dit qu'il s'agissait
d'une autre époque!! On comprend mieux pourquoi le marathon est une
épreuve si mythique. |